Wat Chai Watthanaram constitue pour moi l’un si ce n’est le temple le plus photogénique du parc historique d’Ayutthaya. Niché au bord du Chao Phraya, le Wat Chai Watthanaram est notamment populaire au coucher du soleil, que les visiteurs accèdent idéalement par bateau, comme le roi à l’époque, préférant la rivière à la route. Mais le temple reste très beau même aux lueurs intenses de la journée.
Dominé par un grand prang de style khmer, semblable à celui du célèbre Wat Arun à Bangkok, dont il reprend les mêmes codes architecturaux, le Wat Chai Watthanaram et un temple situé à l’extérieur de ce qui constitue la « vieille ville », qui se définit par l’île formée par la jonction des rivières Chao Phraya et Pasak (en provenance de Lopburi), qui sont jointes par un canal artificiel.
Histoire du Wat Chai Watthanaram
Le temple a été fondé en 1630 par le roi Prasat Thong (qui régna entre 1629 et 1656). Il a été construit comme un mémorial et dédié à sa mère, tout en étant un monument démontrant son attachement au Bouddhisme, même si certains historiens lui attribut plutôt une symbolique de victoire importante sur le royaume khmer voisin, d’où le choix de l’architecture.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce n’est pas le prang central qui aurait accueilli les urnes funéraires mais probablement les deux chedis situés de part et d’autre du ubosot, qui auraient contenus les cendres de la mère et du père de Prasat Thong. Ce que l’on sait, c’est que des tablettes indique une durée de 20 ans pour compléter la construction.
Lors de fouilles, des canons ainsi que des boulets ont été déterrés, en plus de la présence de murs renforcés, indiquant une possibilité que le temple, bordant le Chao Phraya, a été utilisé comme forteresse pendant la dernière guerre avec la Birmanie (le temple aurait justement été renforcé et utilisé par les Birmans eux-mêmes). Guerre à laquelle il ne résistera pas car le monastère, tout comme la ville entière, a été pillé lors de l’invasion birmane de 1767, les statues de bouddhas ont été décapitées et le site grandement endommagé, restant à l’abandon pendant plus de deux siècles.
Toutefois, comparé à d’autres temples considérés comme plus important ( le Wat Phra Si Sanphet notamment, le temple royal de l’époque), il s’en trouve relativement « épargné » et remarquablement conservé. Ce qui est aussi dû à l’importante restauration entamé à la fin des années 80 jusqu’au début des années 90 par le Département des Beaux-Arts. À l’heure où je rédige ces lignes, une nouvelle restauration est par ailleurs en cours.
Les seuls bâtiments qui n’existent plus aujourd’hui étaient ceux construits en bois, notamment les habitations des moines dont on connaît leur existence de par les récits et écrits laissés par les envoyés et ambassadeurs de passage, invités à séjourner dans la cité par le royaume du Siam, alors très ouvert envers les puissances étrangères.
Plus récemment, le site fut endommagé par les importantes inondations de 2011, d’où la présence d’une digue rétractable au bord de la rivière.
Architecture du Wat Chai Watthanaram
Le plan du Wat Chai Watthanaram suit les concepts des anciens temples khmers d’Angkor au Cambodge. Les temples comme le Wat Chai Watthanaram sont, en effet, symétriques, avec une tour centrale représentant le Mont Méru, symbole important dans l’univers dans la cosmologie bouddhiste et hindoue. L’orientation Est-ouest, avec l’ensemble faisant face au lever du soleil, ayant aussi son importance.
S’il en reprend toutes les caractéristiques visuelles, ce qui change par contre est l’utilisation de briques rouges comme principal élément de construction au lieu des blocs en latérite comme c’était le cas à l’apogée du puissant royaume voisin, quelques siècles plus tôt.
On constate également les traces d’un mur fortifié (un mètre de large) qui entourait autrefois le monastère, accessibles via des portes cintrées. L’entrée principale étant celle à l’est, du côté de la rivière Chao Phraya. Il y avait autrefois un embarcadère qui permettait au roi d’accéder au temple par la rivière.
1- Le prang central
On y retrouve à la base une architecture similaire à bien des temples de la période d’Ayutthaya, comme le Wat Mahathat notamment. Ce prang, qui atteint ici les 25 m, symbolise le mont Meru, le centre de l’univers dans la mythologie hindou et se trouve sur un léger promontoire, telle une île entouré par les océans.
Des escaliers mènent depuis chaque point cardinaux à une niche, sauf à l’Est, qui sert d’entrée à l’anti-chambre où se trouvaient les reliques sacrées et autres artéfacts importants conservés dans la tour.
2- Le cloître et la galerie de bouddhas
Entourant le prang central, il faut imaginer un cloître qui en faisait le tour, avec un toit supporté par des poutres en bois, ce qui explique leur disparition suite au saccage et l’incendie qui s’ensuit. À chaque coin, une petite chapelle surmontée d’un toit en forme de chedi, abritent une statue de Bouddha assise, dont le style diffère, car ces dernières possèdent une coiffe au lieu de l’aspect crépu de ses cheveux. Les mêmes abris se trouvent également à chaque point cardinal, portant donc à huit le nombre de tours secondaires.
Vous remarquerez que ces statues ont pu « garder leurs têtes », car bien que décapitées au moment de l’acharnement des troupes birmanes, ces dernières ont par la suite pu être reposées (le nez cassé atteste bien par contre bien d’une chute, comme la marque au niveau du cou). Les plus petites statues qui sont alignées le long du cloître n’ont pas eu cette chance, car il était courant que les plus petites têtes, plus facilement transportables, soient volontairement emportées pour éviter justement d’être remises dans la foulée.
Si vous faites le tour, vous pourrez y voir une seule demi-tête restante, vestige d’un ratage dans ce carnage…
Le mur derrière les restes de statues, qu’il faut s’imaginer autrefois laquées dorées et noires, est exempt de toute ouverture. Sur la partie extérieure, on retrouve de fausse fenêtres, typique de cette architecture influencée par les Khmers, symbolisées par des barreaux, également en brique.
Sous les tours, certaines sont mieux préservées que d’autres, mais pour celle notamment à l’Est (en position centrale), c’est là qu’on remarque le plus les restes des peintures murales qui décoraient l’intérieur de ses structures, avec des motifs de fleurs. Sur la face extérieure, une niche est accolé sur chaque tour, qui abritait également une statue de Bouddha ainsi que de superbe bas-reliefs dont on peut encore admirer quelques traces, essentiellement sur la face Ouest, côté rivière.
3- L’Ubosot (salle d’ordination)
En dehors de la structure centrale en quinconce, on retrouve au bord de la rivière (côté Ouest), les restes de la salle d’ordination (n°3 sur la carte). C’est notamment là où les novices ont été ordonnés moines afin d’intégrer les rangs monastiques. On reconnaît la fonction de ce bâtiment, grâce aux restes de ce qui accueillaient les stèles entourant l’édifice.
Il ne reste aujourd’hui que le sol et l’autel où se trouvaient les principales images de Bouddha, dont il ne reste ici que les restes de deux d’entre elles, en position assises et dont on devine aisément que les têtes manquantes ont été remplacées par des versions plus récemment.
4- Les chedis
Comme évoqué plus tôt, les deux chedis entourant l’ubosot sont ceux censés contenir les cendres (au présent, car elles sont toujours supposées s’y trouver) des parents du roi Prasat Thong , l’instigateur du Wat Chai Watthanaram.
Sur le côté Nord, vous remarquerez un autre chedi, un peu plus petit, ainsi que les bases de trois autres chedis de taille réduites. Celui encore debout dans cette zone contiendrait les cendres d’un des fils du roi. Aux premiers abords, on se dit, quelle délicate attention, mais la réalité est que c’est le roi lui-même qui a condamné à mort celui qui était alors le prince héritier de surcroit. Il a été accusé d’avoir eu une liaison avec l’une des épouses de son père, la condamnant également au même sort, d’où l’autre reste de chedi à côté…
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Mon avis sur le
Wat Chai Watthanaram
Pour vous rendre compte de l’engouement que ça a pris, voici une photo de la route avec les boutiques telles qu’elles étaient fin 2017, avant la diffusion de la série, et le même endroit, l’année suivante.