Le Wat Yai Chai Mongkhon, dont le nom se traduit par «monastère de la victoire de bon augure», a été fondé dès 1357 par le premier souverain d’Ayutthaya, le roi U-Thong. Situé à l’extérieur des murs de la capitale, il accueillit en son sein un groupe de moines qui venaient de s’instruire au Sri Lanka et devint le siège du patriarche (le moine suprême en Thaïlande). Connu à l’origine sous le nom de Wat Pa Kaeo, le temple ne prit le nom actuel de Wat Yai Chai Mongkhon qu’au 16e siècle.
Histoire du Wat Yai Chai Mongkhon
Il est supposé que le temple fut construit sur un site auparavant déjà occupé par un bâtiment religieux, probablement un complexe khmer datant de l’époque Dvaravati (qui s’étale du VI e au XI e), comme l’atteste la présence d’une douve l’entourant, symbolisant l’océan céleste entourant la montagne sacré, le mont Méru. Toutefois, s’il ne reste rien de cette époque plus ancienne, le temple dans sa forme « moderne » a été fondé en 1357 (certaines sources évoquent la date de 1363) par le 1er dirigeant du nouveau royaume d’Ayutthaya, le roi U-Thong (ou Ramathibodi Ier de son nom dynastique, qui régna de 1350 à 1369).
L’origine de sa construction fait suite au décès de deux princes, Chao Kaeo et Chao Thai (deux fils de l’une des femmes de Ramathibodi I), qui succombèrent du choléra. Le roi ordonna alors que les corps des deux princes soient exhumés et qu’un monument sacré (le fameux chedi, ou stupa dans le sens large) ainsi qu’une salle de prédication (viharn) soient établis sur le site de crémation.
Ce complexe hébergea peu de temps après un groupe de moines nouvellement ordonné par « Somedet Phra Wannarat », le chef des moines à l’époque (le patriarche). Ces derniers revenaient de l’île de Ceylan (actuel Sri Lanka) où ils avaient étudié les écritures bouddhistes et s’étaient perfectionnés dans leurs connaissances de la méditation. Il était alors connu sous le nom de Wat Pa Kaeo (aussi orthographié Wat Pakew), qu’on peut traduire par temple de la forêt de cristal.
Deux siècles plus tard, en 1548, le temple est utilisé comme lieu de rendez-vous pour mettre en place un complot visant à renverser le roi Worawongsathirat, considéré comme un usurpateur et assassiné avec son épouse Si Sudachan, après seulement 42 jours de règne. Ce bouleversement vit l’arrivée au pouvoir du prince Thianracha, couronné sous le titre de Maha Chakkraphat (r.1548-1569) et considéré comme légitime car provenant de la lignée de la dynastie de Suphannaphum, qi régnait alors depuis 150 ans sur le royaume.
Bien qu’il n’en soit étonnamment pas fait mention dans les chroniques royales, il est assumé que l’agrandissement du temple fait suite à la victoire sur l’armée birmane par le roi Naresuan en 1592.
Connue comme la bataille de Nong Sarai, cet épisode historique de première instance, s’est conclu par la mort du prince héritier Birman par les mains même du roi Naresuan, lors d’un combat épique voyant chaque souverain s’affronter sur leur éléphant de guerre en face à face. Une scène qu’on retrouve sur de nombreuses peintures à travers le royaume et sur justement l’un des murs intérieur de l’ubosot au Wat Yai Chai Mongkhon.
Le roi Naresuan ordonna la restauration du temple et le principal chedi est agrandi pendant ces rénovations, devenant le Phra Chedi Chaiya Mongkhon, d’où en découle le nouveau nom du temple. C’est aussi à cette période qu’est ajouté la salle abritant un bouddha couché, ce dernier étant positionné dans un axe nord-sud avec le visage tourné vers l’Est.
Encore deux cents ans plus tard et le temple est de nouveau mêlé à la guerre contre les Birmans. Le Phraya de Tak (qui deviendra plus tard le nouveau roi sous le nom de Taksin, en fondant sa capitale à Thonburi, précédent la fondation de Bangkok) a été promu par
le roi Ekathat commandant d’une flotte de navire, afin de contrer l’avancée de l’armée birmane sur la capitale.
C’est dans ce monastère même qu’il a constitué son armée pour affronter les Birmans à la fin de l’année 1766. L’année suivante marque l’année fatidique avec la chute de la cité, en 1767 en effet, le temple a été saccagé et le temple abandonné pendant près de deux siècles.
Le monastère a été officiellement rétabli et reconnu en 1957, en faisant l’un des rares anciens temples d’Ayutthaya toujours actif de nos jours. C’est à ce moment que les statues en béton entourant le cloître sont ajoutées. La statue de Bouddha couché est quant à elle refaite en 1965, car l’originale avait été trop endommagée par les pillards.
Enfin, en 1979, l’abbé du temple coordonne, avec le département des Beaux-Arts Thaïlandais, la reconstruction de l’ubosot, tout en préservant la structure d’origine qui reste bien visible.
Architecture du Wat Yai Chai Mongkhon
La structure de base du temple ne réserve pas de surprises puisqu’on y retrouve l’alignement des bâtiments dans l’axe est-ouest, avec le viharn à l’ouest, le chedi central et l’ubosot à l’est. Autour du chedi se trouvait un cloître couvert à l’origine tandis que les environs sont parsemés de plusieurs chedis de tailles diverses.
Comme le temple est toujours actif, on y trouve également des kutis, des habitations pour les moines, consistant en une petite structure en bois sur pilotis, semblable à une petite maison. Enfin, dans le coin nord-est se trouve les restes du viharn qui abritait le Bouddha couché.
1- Le grand chedi (Phra Chedi Chai Mongkhon)
Avec ses 60 m de hauteur, le grand chedi du Wat Yai Chai Mongkhon était assurément l’un des points de repère d’Ayutthaya, dépassant largement et visible de tous pour ceux qui arrivaient par l’Est. C’est l’un des rares temples avec le Wat Phu Khao Thong à reprendre les codes architecturaux des temples birmans.
Le chedi se décompose en trois parties avec d’abord une base carré de 32 m de côté, surmonté d’un dôme en forme de cloche, typique des stupas de l’ère d’Ayutthaya, qui repose elle-même sur une structure orthogonale, posée sur la terrasse de la base carré. Sur chaque coin de cette plateforme, située à 15 m de hauteur, se trouvent également de plus petits chedis. Il y a par ailleurs une vue privilégiée sur cette partie de la ville, car le temple n’est pas entouré d’immeubles.
Des escaliers mènent à l’intérieur du chedi et sont orientés vers l’Est, avec un embranchement d’escaliers menant à la terrasse peu avant l’entrée du dôme. Dans la chambre sous le dôme, se trouvent plusieurs statues de Bouddha tandis qu’au centre, se trouve un puits laissant apercevoir l’emplacement d’origine des reliques (le grand chedi ayant été construit par-dessus l’original).
La tradition étant de jeter une pièce au fond du puits, en visant le centre du carré de pierre, véritable cœur sacré du temple et si succès, est interprété comme un signe de chance à venir où d’exaucement d’un vœu formulé juste avant de jeter la monnaie.
2- La galerie
Une galerie rectangulaire encercle le chedi principal. Ce cloître était évidemment couvert d’un toit autrefois dont il ne reste aujourd’hui que les fondations des piliers l’attestant. Le long du mur intérieur de la galerie se trouve des rangées de Bouddha en position assise, qui restent à ce jour à l’état brut, sans dorure ni peinture.
Ces statues de Bouddha ont été sculptées lorsque le temple fut réhabilité en 1957 afin de remplacer celles d’origines, qui étaient trop abîmées avec le temps. Sous leur base, on peut apercevoir des plaques, indiquant que plusieurs d’entre elles contiennent les cendres des défunts.
Une petite tente à côté du mondop de gauche laisse la possibilité aux visiteurs de faire un don permettant d’accrocher un drap (symbolisant la robe des moines) autour de l’une des statues, un geste qui s’accompagne généralement d’une prière.
3- Les mondops
Deux mondops se tiennent à l’avant de chaque côté de l’escalier grimpant à l’intérieur du chedi. Les structures pyramidales qui couvraient autrefois les statues se trouvant à l’intérieur se sont effondrées, laissant aujourd’hui ses dernières exposées, sans toit. Les statues ont été rénovées et il est courant de voir des également des personnes payer pour appliquer un drap sur la statue et faisant une prière au pied de celle-ci.
4- Le viharn principal
Situé à l’Ouest du chedi, se trouve les restes de la salle de sermon, où se retrouvaient les moines pour prêcher. Il n’en reste guère que les fondations, avec au milieu des rangs de haies qui ont été placés là pour « embellir » la ruine. Au fond, se trouvent plusieurs statues, des disciples face à une représentation de Bouddha debout, le tout étant évidemment des reconstructions récente.
5- L’ubosot
La salle d’ordination ou ubosot, se trouve à l’Est et donc devant le grand chedi. Le hall mesurait à l’origine 16 m sur 44 m. Il est aujourd’hui couvert par une charpente et des murs modernes, construits par dessus en taille plus modeste, afin notamment de préserver intact l’état de la structure d’origine. La statue qu’on trouve à l’intérieur de l’ubosot, appelée « Phra Phuttha Chaiya Mongkhon » est l’un des Bouddha les plus sacrés à Ayutthaya, et le temple s’avère donc très fréquenté par les Thaïlandais, qui prient sur la partie extérieure de la salle d’ordination (qui correspondait autrefois à l’entrée du bâtiment).
Les barres de fer dépassant des deux façades de ce bâtiment indique que le projet final n’a jamais été abouti. Je ne pense pas ici qu’il s’agisse d’un manque de budget mais il est clair que des ornements étaient prévus mais non placés.
6- Le viharn au bouddha couché
Situé dans le coin nord-est du temple, juste à côté du parking et de l’entrée principal du complexe, vous verrez les ruines du viharn qui contient une grande statue de Bouddha couché. Cet ensemble, construit sous le règne du roi Naresuan, se trouve dans un axe nord-sud, avec le Bouddha faisant face au soleil levant.
Le toit a disparu, mais la statue est toujours entourée par des portions de murs. Le bouddha est une reconstruction avec une petite touche inhabituelle, car dans cette position, il est généralement représenté les yeux clos tandis qu’ici, ils sont grands ouverts.
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Wat Yai Chai Mongkhon