Cette journée fut consacrée à la visite d’Ancient City, au Sud Est de Bangkok (province de Samut Prakan). Ancient City, ou Muang Boran en Thai est un parc ayant la forme de la Thaïlande regroupant sur 128 hectares 116 monuments, centre d’intérêt du pays (certains n’existant plus en vrai). Ce musée grandeur nature est né de l’ambition d’un riche concessionnaire automobile qui a mis tout son argent dans ce projet orignal.
Cela permet donc en une seule journée de voir les multiples facettes de la Thaïlande au gré d’une balade à vélo par exemple, disponible en location à l’entrée (ce que nous avons fait, 3h30 pour faire le tour des principaux sites), petit bémol, c’est aussi ouvert pour les voitures…
Certains monuments sont des reproductions à taille réelle d’autres au 3/4. Le souci du détail et le calme régnant dans ce parc en font un lieu agréable pour passer une journée de détente. Des services de restauration sont évidemment présents dans son enceinte et l’accès facile notamment en taxi qui attendent à la sortie pour le retour. Il vaut mieux faire la visite en matinée, les horaires d’ouvertures sont 8h-17h (EDIT 2016 : nouveau horaire 9h-19h!).
Notre petit déj une fois prit, nous étions prêt pour le grand tour, ponctué pour ma part de nombreux arrêts, photos oblige, ce qui fait que j’ai passé pas mal de mon temps seul à photographier et à rattraper ensuite Jitima qui continuait en général d’avancer.
Je n’y avais pas pensé avant, voici une vue du ciel pour mieux situer.
Le site est construit de manière à correspondre à la forme de la Thaïlande.
Vue du ciel.
Petite précision concernant les Jonques Thais, de par leur position stratégique par rapport au fleuve Chao Phraya, des villes comme Ayutthaya ou Bangkok ont su développer un commerce important, grâce notamment à ce type de transport, amarré le long des rives jusque dans les années 1950.
Qu’est qu’un « Sala »
Il est dans la tradition Thaï de construire des lieux publics tels que des temples ou des Thaï Sala (comprendre pavillon) . Fonctionnant comme un centre public, ils étaient utilisés comme lieux pour faire des cérémonies Bouddhiste pour s’attribuer des mérites par exemple et bien d’autres activités sociales. La structure du bâtiment finement réalisée ne montre pas seulement le bien-être de la communauté, mais aussi la générosité de la personne qui en demande la construction.
Cette « Sala » fut nommé Ramayana Pavillon en raison des peintures murales à l’intérieur, le Ramayana étant une littérature populaire dans toute l’Asie du sud-est, retraçant l’histoire du prince Rama, un avatar (une incarnation d’une divinité sur terre, a ne pas confondre avec le nom commun pour designer les rois de la dynastie Chakri, celle régnant actuellement) du Dieu Hindou Vishnu.
La procession construite ici à Muang Boran est faite dans le style de la période où Ayutthaya était prospère. Cette procession a été crée dans le but de célébrer cette prospérité et la dignité du royaume. De nos jours, cet événement existe toujours, d’une grande intensité et autant apprécié des Thaïs que des étrangers de par la beauté de cet enchaînement de barges donnant au fleuve des allures de défilé du savoir-faire et de la culture Thaï.
C’est un évènement plutôt exceptionnel qui n’a lieu que pour une occasion spéciale (en moyenne, tous les 3/4 ans) .
[EDIT 2014: la dernière sortie des barges était le 9 Novembre 2012]
Le nom un peu barbare tel que donné sur le site d’Ancient City mérite une petite explication. Bodhisattva aussi honoré sous le nom de Kuan Yin, est un terme sanskrit qui veut dire littéralement « être d’éveil » (Bodhi), d’illumination. Avalokitesvara quant à lui veut dire « seigneur qui observe de puis le haut« . Kuan Yin est le nom donné à la déesse de la compassion, le Bodhisattva Avalokitesvara est composé ici d’une image de Bouddha sur une couronne apposé sur les têtes des déités. Ces divinités ayant protégé l’humanité des mauvais esprits en les effrayants.
Petites explications sur les différents courants du Bouddhisme
Ce qui pourrait se traduire par le pavillon des illuminés (évidemment pas de le sens péjoratif mais bien religieux). Ce lieu évoque le bouddhisme de Mahâyâna, qui signifie « grand véhicule », une des trois forme de bouddhisme qui existe, celui dominant en Thaïlande étant Theravâda signifiant « petit véhicule », le dernier étant Vajrayâna. Theravâda est souvent associé à Hinayâna, petit et grand véhicule étant une forme de courant quant à la façon d’enseigner le bouddhisme. Une phrase qui illustre bien la différence entre Theravâda et Mahâyâna :
Le bouddhisme theravada est comparable aux racines de l’arbre, alors que le bouddhisme mahayana en serait les branches. Sans arbre, vous ne pouvez pas avoir de branches, ni de fleurs, ni de fruits.
Cf le Vénérable Dhammaratana, moine bouddhiste dans le courant du Theravâda, chercheur à l’Unesco et à la Sorbonne.
Il a également dit que tous les courants sont uniquement des déviances de l’homme, le Mahayana n’étant qu’un développement du bouddhisme enseigné par le Bouddha, voulu modernisé, évoluant avec les traditions, l’époque, le pays, tandis que le Theravada s’en tiens à l’enseignement d’origine, sans en changer les mots et sa valeur, il se veut l’héritier de la doctrine originelle du Bouddha.
Je mets un lien d’ailleurs sur cette interview très bien pour comprendre les différences :
Interview du Vénérable Dhammaratana
Signifiant diamant, le dernier courant Vajrayâna est considéré par ses adeptes comme le bouddhisme ultime, regroupant les connaissances des 2 autres, Vajrayâna véhicule)
Pour en revenir à ce pavillon, celui-ci fait donc référence au bouddhisme Mahâyâna, forme du bouddhisme donc pratiquée par des gens de différents niveaux d’éthique et de valeur spirituelle.
L’enseignement religieux et la formation requièrent donc des stratégies appropriées. L’histoire des 500 moines illuminés est une de ces stratégies pour montrer aux gens de différents horizons, avec des codes de conduites différentes, différents mérites, qu’ils peuvent tous devenir des « illuminés » (pas de le sens premier du terme…) et atteindre le Nirvana.
Je ne vais pas développer plus ici, car le sujet est tellement vaste et compliqué, j’ajouterai juste une petite note indiquant que le bouddhisme Theravâda est la seule religion considérant qu’il n’y a pas de dieu créateur tout-puissant, la doctrine étant qu’il s’agit d’atteindre l’éveil, c’est à dire de se sortir du cycle des réincarnations.
La grosse parenthèse est finie, j’espère que la façon dont je me suis exprimé est assez claire et intéressante, je reprends le cours de cette journée.
Une petite pause s’impose, il ne fait pas spécialement chaud, car plutôt nuageux ce jour-là, mais avec le parcours à vélo notamment, boire un peu n’est pas de refus. Nous nous arrêtons à un petit stand vendant des jus de fruits frais, pressé sous vos yeux. Nous nous asseyons sur la terrasse du restaurant à côté, vide de mangeur…
Ce restaurant est situé sous le Ho Kham, qui est un terme provenant de la Thaïlande du Nord qui pourrait se traduire par luxueux hall ou pavillon doré.
Utilisé comme résidence officielle par le Gouverneur Royal de la province de Lampang pendant la période Rattanakosin. La maison originale a malheureusement été détruite il y a une trentaine d’années.
Nommé ainsi du nom d’un miracle. D’après le mythe bouddhiste, le Bouddha donna une graine de mangue à Nai Khanta pour s’en occuper et la faire pousser. Grâce au pouvoir de Bouddha le manguier poussa très vite donnant des fruits savoureux au peuple. Un groupe d’hérétiques n’ayant pas foi en Bouddha abattirent l’arbre.
C’est alors que Lord Bouddha accomplit le miracle, nommé aussi « le miracle des jumeaux », car celui-ci se dédoubla en positionnant en posture de méditation et allongé. Puis il prêcha pour aider les gens à atteindre le Nirvana et empêcher toute souffrance. Telle est la signification de cette sculpture posée sur un tronc.
Les statues de ce jardin sont inspirées d’une légende. Nang Ai était la plus belle fille de la ville de Khomkham. Elle avait des rendez-vous galant secrets avec Pha Daeng, le dirigeant de la ville. Sa beauté aurait attiré le fils du roi Naga. Celui-ci se transforma alors en séduisant gentleman pour essayer de la charmer, mais il ne parvint pas à gagner son cœur.
Finalement, le prince Naga se transforma en écureuil blanc afin d’approcher Nang Ai et la kidnapper. Mais en voyant l’écureuil Pha Daeng dépêcha des chasseurs pour le piéger. Le prince se fit donc tuer par les chasseurs. La viande de l’écureuil allait servir pour nourrir les gens de la ville, mais au fur et à mesure qu’elle était découpée celle-ci grossissait, permettant même de nourrir la ville voisine.
Peu après, des pluies torrentielles s’abattirent sur ces villes, considérant l’événement comme anormal Pha Daeng et Nang Ai tentèrent de fuir à cheval, mais celle-ci chuta et tomba dans le torrent de la rivière, l’esprit de l’écureuil mort s’étant métamorphosé en roi Naga, prenant Nang Ai dans son royaume sous-marin. Il est dit que ceux qui n’avaient pas mangé de la viande furent épargnés.
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La reconstitution des monuments se veut fidèle, ici le créateur du parc est allé jusqu’à créer une colline artificielle (qui culmine tout de même à 55 mètres pour 66 mètres de longueur), car le véritable monument est situé au sommet d’une colline nommé Phra Wihan à la frontière Thaï-Cambodge
[EDIT 2013 : Temple qui a fait l’objet de tensions entre la Thaïlande et le Cambodge, le temple étant attribué au Cambodge, mais la Thaïlande le réclamant toujours, ne reconnaissant pas le tracé de la frontière, établi par les Français pendant l’Indochine. Aujourd’hui, les choses se sont un peu calmées, il y eut tout de même quelques morts, surtout dû à la présence de mines, plus de présence militaire sur les lieux, les 2 pays ayant été sommés de quitter la zone par la cour internationale]
Le vrai Preah Vihear est un sanctuaire de pierre construit autour de l’année 1038 sous le règne du roi Suryavarman. Aujourd’hui, ce monument appartient au Cambodge bien que géographiquement parlant, car les chemins (comme celui passant sous le gros rock que forme la crête de la colline) descendent directement dans la Thaïlande, au Nord-Est du pays.
D’ailleurs, il est plus aisé de venir visiter pour les Thaïs à qui ils suffisent d’emprunter ces chemins tandis que les Cambodgiens doivent monter par les escaliers abîmés et trop raides, ce qui en devient inconfortable.
[EDIT 2014: voir les dernières infos concernant le Preah Vihear]
Le royaume de Dvaravati fut longtemps considéré comme le centre du Bouddhisme Hinayâna. Les arts religieux furent largement diffusés autour de Nakhon Pathom, la capitale du royaume de Dvaravati. Son influence fut visible tout autour de par les nombreux Ubosot (hall d’ordination), les Wihan (salle d’assemblée) et les Chedis (appelés aussi Stupa).
À noter que les monuments sont reproduits dans leur état actuel (certains donc je le rappelle n’existant même plus en vrai), il aurait été intéressant de voir une reproduction telle que ça aurait pu être du temps de sa splendeur.
Le Sanphet Prasat Palace était le principal palace au début de la période d’Ayutthaya. Initialement construit sous le règne du roi Borom Trailokanath, le 8e roi d’Ayuttaya, vers le milieu du 15e siècle. Il conçut avec succès un style architectural unique qui diffère clairement du style Khmer ou de Sukhothai. Le palace était beaucoup utilisé pour diverse cérémonie et réception officielle, notamment l’accueil de délégation étrangère. C’est ainsi que le Chevalier Chaumont fut accueilli pour présenter les lettres de créance du roi Louis XIV.
Peu après les Birmans envahissaient et détruisaient la ville en 1767, le palace fût brûlé marquant la chute du royaume d’Ayutthaya, et seule les fondations du prasat subsistèrent.
Par la suite, le roi Rama IV voulu honorer les rois d’Ayutthaya en reconstruisant un prasat sur les fondations de l’ancien. Mais celui-ci mourut avant la fin de la concrétisation de ce projet. Son fils Rama V détruisit le prasat non terminé pour en faire un pavillon de cérémonie.
Le Sanphet Prasat Palace est donc un exemple de monument reconstitué (comme je mentionnais dans la page précédente, en disant que ce serait bien qu’il fasse des reconstitutions, et bien en voilà un exemple, mais c’est un des seuls…). Ce palais a été reconstruit sur le parc en se basant sur des plans de la structure originale et d’indications prises sur des documents archéologiques et historiques thaïs et étrangers.
A noter que ce palais reconstitué de Muang Boran a servi lors d’une réception officielle où le roi actuel Rama IX accueilli la reine Elizabeth II.
Selon un conte populaire de Saraburi, un chasseur nommé Phran Boon a suivi un cerf qu’il avait blessé au pied d’une colline. Là, il vit le cerf blessé boire l’eau d’une flaque. Incroyablement, les blessures de l’animal ont soudainement disparu.
Quand le cerf s’est enfui, le chasseur est venu pour regarder vers la flaque d’eau et a constaté que cette flaque était en fait l’empreinte de pas de Bouddha. Conservé dans ce montop qui fût construit au sommet d’une colline dans la province de Saraburi dans le style architectural d’Ayutthaya encore une fois, cet endroit est considéré comme un des endroits les plus sacrés de Thaïlande.
Prang Sam Yod ou le « Sanctuaire aux trois cimes », fait de latérite (roche rouge), est situé au cœur de la province de Lop Buri. Construit dans un style où se ressent l’influence du l’art Khmer, le sanctuaire date du 13ème siècle.
Ceci est un monument dédié au courage des habitants d’une localité proche d’Ayutthaya, capitale de l’époque. En effet sous le règne du roi Ekathat les troupes birmanes envahissent le royaume. Ils violèrent, pillèrent et brûlèrent les maisons.
Ce qui mit en colère les habitants du village de Sing Buri qui commencèrent à organiser une milice afin de protéger leur communauté qui se retrancha dans un lieu connu sous le nom de Khai Bang Rachan qui était en fait un fort entouré de palissades en bois.
Ils ont combattu bravement les Birmans à 8 reprises sur une durée de 5 mois au total avant d’être finalement battus. Les Birmans ont tenu un siège avec des canons, tandis que dans le fort ne possédaient rien de tel pour se défendre malgré une tentative d’en fabriquer en faisant fondre les métaux qu’ils avaient à disposition. Découragés après avoir combattu vaillamment 5 mois, ils furent finalement massacrés.
À noter qu’ils envoyèrent des émissaires dans la capitale pour leur demander en renforts des canons, renforts refusés, erreur de la capitale, qui tomba justement sous le feu de l’ennemi puisque je le rappel les Birmans détruisirent et mirent fin au royaume d’Ayutthaya en 1767, cet épisode de Bang Rachan se terminant tout juste vers la fin de l’année précédente en 1766…
Le courage inébranlable des villageois est un des actes d’héroïsme les plus grands enregistrés dans l’histoire thaïe. Et à ce propos un film Thaï tout simplement intitulé Bang Rajan est sorti en 2000 sur leurs écrans, avec un budget énorme de 50 millions de baths (environ 1M d’euros) c’est 4 fois plus que le budget moyen des autres productions Thaïes de l’époque et il rapporta la coquette somme de 300 M ! À savoir également pour les cinéphiles qu’il fut présenté par Oliver Stone himself lors d’une sortie limité aux USA.
Passage devant le Musée Erawan
Erawan est le nom thaï de l’éléphant mythologique Airavata, un éléphant blanc qui porte le dieu Indra (divinité de la guerre) dans la religion hindouiste. C’est un éléphant gigantesque, représenté ici avec trois têtes (mais parfois avec bien plus)
Nous ne sommes pas aller visiter ce musée mais je sais que les trois étages à l’intérieur de l’éléphant contiennent des antiquités et des collections d’objets religieux antiques appartenant à M. Lek Viriyapant, le propriétaire de musée qui n’est autre que le créateur et également propriétaire d’Ancient City !
Ce n’est pas peu de le dire… Pour la petite anecdote, à l’aller, j’étais relativement fatigué et je profitais du trajet (Muang Boran se trouve en fait en dehors de Bangkok dans la ville et province de Samut Prakan, à seulement 500 m de la mer, là où le fleuve Chao Phraya s’y jette) pour dormir un peu.
En train de rêver, Jitima me réveilla en me tapotant l’épaule et me fit tourner la tête, à moitié endormi, je me retrouve avec cette gigantesque statue sous les yeux qui sur le coup me faisait penser à un véritable monstre ! Jitima morte de rire me voit faire un bon dans la voiture et moi, je réalise juste ce qui m’arrive…
C’est donc avec un sourire en coin tous les deux que nous repassons devant au retour.